La survie d’American Airlines toujours en question
jeudi 17 avril 2003.
American Airlines a évité d’extrême justesse la faillite grâce aux sacrifices salariaux de ses employés mais la première compagnie aérienne du monde est loin d’être tirée d’affaires en raison de la crise sans précédent frappant le transport aérien américain.
« La situation financière d’American est fragile et ses perspectives restent incertaines » malgré les importantes réductions de salaires —1,8 milliard de dollars par an, soit 21% de la masse salariale— acceptées par les 100.000 employés de la compagnie, a averti son Pdg Don Carty.
« Le succès de nos efforts n’est pas garanti à cause d’un environnement financier et économique hostile », a martelé M. Carty quelques instants après l’annonce mercredi soir de la ratification des coupes salariales par les hôtesses de l’air et stewards, la dernière catégorie de personnel à accepter ces mesures.
Les baisses de salaires, comprises entre 15% et 25% selon les postes de travail, ont été ratifiées à contre-cœur comme le montrent les résultats serrés du scrutin. Seulement 52% des hôtesses et 53% des mécaniciens ont voté pour.
Les salariés ont choisi « entre le mauvais et le pire », c’est-à-dire entre une chute de leurs rémunérations et la faillite, a résumé le président du syndicat du personnel navigant, John Ward.
La direction avait en effet menacé de demander une mise en faillite « immédiate » si les accords passés avec les syndicats n’étaient pas ratifiés par tous les employés.
Les diminutions de salaires vont permettre de réduire les énormes pertes d’American —3,5 milliards de dollars l’an dernier, un record pour une compagnie aérienne américaine— mais un retour aux bénéfices n’est envisageable au mieux qu’en 2004 et à condition que le trafic aérien se redresse, estiment les analystes.
La situation financière déjà très précaire d’American depuis les attentats du 11 septembre 2001 s’est encore aggravée avec le conflit en Irak et l’épidémie de pneumonie atypique qui ont fait chuter encore davantage le trafic et les réservations.
« Nous ne considérons pas American comme sortie d’affaires étant donné son importante exposition dans de nombreux secteurs à problèmes en termes de revenus, notamment les voyages d’affaires, les vols transatlantiques et le marché sud-américain », soulignent les analystes de Credit Suisse First Boston dans une note publiée jeudi.
Selon ces experts, American est aussi une des compagnies américaines « les plus exposées à la concurrence » des transporteurs offrant des prix bon marché comme Southwest ou JetBlue.
En dépit des coupes salariales, les coûts d’exploitation d’American resteront largement supérieurs —au moins 20%— à ceux des compagnies discount qui sont les seules à rester bénéficiaires actuellement aux Etats-Unis.
American a évité la faillite mais « la partie n’est absolument pas encore gagnée », estime aussi Bear Stearns. « La prochaine étape sera de dures négociations » avec ses fournisseurs et ses créanciers pour obtenir des réductions ou des rééchelonnements de dettes, explique la firme d’investissements.
Certains analystes sont néanmoins plus optimistes.
Les réductions de coûts mis en œuvre par American et totalisant 4 milliards de dollars par an, dont 1,8 milliard en réductions de salaires, « devraient être suffisantes pour lui permettre de survivre même dans un environnement faible en termes de revenus », affirme Blaylock and Partners.
« Il est possible qu’American redevienne bénéficiaire l’an prochain grâce à ces réductions de coûts », ajoute cette société d’investissements.
La faillite étant écartée au moins pour l’instant, l’action American Airlines continuait à s’envoler jeudi à Wall Street où elle gagnait plus de 20% à 5,10 dollars en fin de matinée.